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Obésité canine
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L’obésité canine est une maladie chronique entraînant des altérations sérieuses des différentes fonctions corporelles et limitant la longévité des animaux. C’est la maladie d’origine nutritionnelle la plus fréquemment rencontrée chez le chien dans les pays industrialisés mais son traitement est efficace. La prévention de l’obésité demande une discipline nutritionnelle tout au long de la vie de l’animal mais plus particulièrement à certains moments clés où le risque de développer une surcharge pondérale est augmenté. Le traitement de l’obésité canine est compliqué par divers problèmes dont le manque de prise de conscience des propriétaires qui souvent ne reconnaissent pas ou minimisent le surpoids de leur animal. Sans la coopération totale des propriétaires, il est impossible de faire maigrir un chien. Le vétérinaire devra donc d’abord convaincre ces derniers avant la mise en place de protocoles d’amaigrissement et d’accompagnement des animaux obèses.
Bien que différents stades ou degrés de surpoids puissent être distingués chez le chien, nous utiliserons dans cette synthèse le terme "obésité" pour qualifier toute surcharge pondérale. Nous nous attacherons à définir l’obésité, à expliquer sa pathogénie, les troubles associés, son évaluation, les différents types de régimes et enfin le traitement pratique de cette affection.
Marianne DIEZ
DVM, Ph.D, Dipl ECVCN
Marianne Diez est Docteur en Médecine vétérinaire et Maître de Conférence dans le service de Nutrition des Animaux domestiques de la faculté de Médecine vétérinaire de l’Université de Liège (Belgique), où elle a obtenu son PhD en 1998. Elle est chargée de l’enseignement de la Nutrition générale et de la Nutrition des Animaux de compagnie. Dans ce cadre, elle s’est investie dans le développement de la consultation de Nutrition clinique. Ses travaux concernent l’alimentation du chien et plus particulièrement les fibres alimentaires, les prébiotiques et l’obésité canine. Elle est auteur ou coauteur d’environ 80 articles scientifiques et Founding Diplomate du Collège Européen de Nutrition Vétérinaire Comparative (ECVCN).
Patrick NGUYEN
DVM, MS, Dipl ECVCN
Diplômé de l’École Nationale Vétérinaire d’Alfort depuis 1977, Patrick Nguyen travaille comme Assistant au Département de Nutrition pendant 2 ans avant de rejoindre l’École Nationale Vétérinaire de Nantes. En 1982, il passe l’Agrégation de Nutrition et devient Professeur. Il obtient une Habilitation à Diriger des Recherches de l’Université de Nantes et devient Diplomate du Collège Européen de Nutrition Vétérinaire Comparative (ECVCN). Assesseur du Directeur de l’École Vétérinaire de Nantes entre 1992 et 1996, il est depuis à la tête de l’Unité de Nutrition et d’Alimentation, et dirige également le Département de Biologie et de Pharmacologie depuis 2001. Patrick est en charge des programmes d’enseignement et de recherche en Nutrition. Son domaine principal de recherche concerne l’obésité et la résistance à l’insuline chez les animaux de compagnie, en collaboration avec le Centre de Recherche de Nutrition Humaine de Nantes. Il est aussi impliqué dans des projets de recherche concernant les conséquences de la stérilisation chez le chat et sur la sensibilité digestive des chiens de grandes races. Patrick a plus de 100 publications et communications à son actif. Il est Président de l’ECVCN depuis 2004.
1. Obésité canine
Définition
L’obésité est un "état pathologique caractérisé par un excès de dépôt lipidique entraînant des modifications des différentes fonctions corporelles". L’Organisation Mondiale de la Santé (WHO, 1997) va plus loin en définissant l’obésité humaine comme "un excès de masse grasse entraînant des conséquences néfastes pour la santé". Bien que cette définition apparaisse assez brutale, elle est tout à fait transposable aux animaux de compagnie. Sur un plan quantitatif, l’obésité a été décrite chez l’homme comme une surcharge pondérale de 15 % par rapport au poids optimal. Cette approche un peu réductrice n’est plus utilisée en tant que telle; elle a été remplacée par les indices de masse corporelle qui déterminent, pour l’homme et la femme, un intervalle de poids optimal pour une taille donnée. Dans le cas du chien, on ne dispose pas d’un tel outil. Une définition "mathématique" de l’obésité est peu pratique (Markwell & Butterwick, 1994); elle implique la connaissance du poids de forme qui n’est pas toujours facile à déterminer, y compris chez les chiens de race. L’idéal est de connaître le poids adulte du chien, avant qu’il ne soit devenu obèse, afin d’avoir une référence pour l’évaluation de la situation initiale et le suivi de l’animal. Dans certains cas, l’animal a toujours été en excès pondéral, y compris durant sa croissance, et le poids optimal est inconnu.
Des outils spécifiques ont été développés pour les vétérinaires : les indices de condition corporelle (voir plus loin). L'excès de poids peut par exemple se traduire par un indice corporel supérieur à 3 sur une échelle de 5 points. (© Alex German).
Épidémiologie de l’obésité
Fréquence
La fréquence de l’obésité chez les chiens présentés en consultation varie de 24 à 44 % selon les études les plus récentes (Tableau 1), les lieux de réalisation des études épidémiologiques et les critères définis au départ (Mason, 1970; Meyer et al., 1978; Edney & Smith, 1986; Armstrong & Lund, 1996; Robertson, 2003).
Tableau 1 - Fréquence de l’obésité dans la population canine | |||
Références | Pays | Taille de l’échantillon (nombre de chiens) | Estimation |
Krook et al., 1960 | Suède | 10993 | 9% |
Mason, 1970 | Angleterre | 1000 | 28% |
Edney, 1974 | Angleterre | 1134 | 34% |
Meyer et al., 1978 | Allemagne | 266 | 30% |
Edney & Smith, 1986 | Angleterre | 8268 | 24% |
Armstrong & Lund, 1996 | USA | 23000 | 25% |
Lund et al., 1999 | USA | 30517 | 28% |
Royal Canin, survey (2000) | France Angleterre Espagne Allemagne | 400 vétérinaires interrogés | 20 - 22% |
Jerico & Scheffer, 2002 | Brésil | 648 | 17% |
Robertson, 2003 | Australie | 860 | 25% |
Ces données ne reflètent pas toujours la situation du terrain: certaines études servent toujours de référence alors qu’elles datent de plus de 30 ans; d’autres ont été réalisées dans un nombre limité de cliniques vétérinaires et ne reflètent pas nécessairement la situation du pays. Néanmoins, toutes les études faites dans les cabinets vétérinaires des pays industrialisés ou dans des villes de taille importante révèlent une prévalence d’au minimum 20 % de chiens obèses. Une enquête téléphonique réalisée auprès de 400 vétérinaires dans 4 pays européens (France, Allemagne, Espagne et Angleterre) en mai 2000 montre que les vétérinaires estiment à 20 % la proportion de chiens obèses (le terme d’obèse étant associé à la nécessité de mettre en place un régime hypoénergétique) (Royal Canin, 2000).
En conclusion, les données épidémiologiques ne permettent pas d’affirmer que la fréquence de l’obésité est en augmentation depuis 10 ans mais l’obésité représente cependant un problème médical majeur dans la population canine.
Facteurs de risques (Tableau 2)
Tableau 2 - Facteurs de risque d’obésité |
- Races prédisposées - Facteurs génétiques - Age - Sexe - Stérilisation - Traitements contraceptifs - Obésité secondaire aux maladies endocriniennes - Obésité secondaire à la prise de médicaments - Sédentarité et manque d’exercice - Alimentation non adaptée au besoin énergétique de l’individu - Dimension sociale de l’aliment - Propriétaire uniquement soucieux de "faire plaisir" à son chien |
La race
La race est un facteur de risque d’obésité dans l’espèce canine mais les races prédisposées varient en fonction des auteurs et des études. Ainsi, au Royaume-Uni, dans les années 1980, les races particulièrement prédisposées et fréquemment citées étaient le Labrador Retriever, le Cairn Terrier, le Berger d’Écosse ou Colley, le Basset Hound, le Cavalier King Charles Spaniel, le Cocker Spaniel, les Teckels à poils longs et le Beagle (Edney & Smith, 1986).
Ces races étaient très courantes en Angleterre à l’époque où l’étude a été réalisée. Les races atteintes peuvent varier selon les pays et selon certaines modes. Selon Krook & coll. (1960), les races prédisposées à l’obésité en Suède étaient le Rottweiler, le Saint-Bernard, le Berger écossais, le Terre-Neuve, le Scottish-terrier et le Chow Chow. Inversement, certaines races semblaient être plus résistantes: il s’agissait des lévriers et des chiens de bergers. Cependant, dans l’étude de Meyer & coll. (1978) réalisée en Allemagne, les Bergers allemands, les Caniches ou les Boxers étaient fréquemment obèses. Il faut donc nuancer cette notion de race prédisposée même si les praticiens reconnaissent rencontrer plus d’obèses parmi les Labrador Retrievers que parmi les lévriers. L’obésité semble aussi devenir un problème courant dans d’autres races (Tableau 3). Le type de sélection peut influencer l’état corporel (et le poids) des chiens, en substituant des critères de beauté ou de format à des critères d’aptitude au travail, par exemple. Les prédispositions raciales sont en partie liées à des facteurs génétiques et plus particulièrement au rapport masse maigre/masse grasse déterminant le besoin énergétique d’entretien (Figure 1).
Tableau 3 - Races canines prédisposées à l’obésité (D'après Edney & Smith, 1986) | |||
Petites | Moyennes | Grandes | Géantes |
Cairn Terrier Teckel Cavalier King Charles Scottish Terrier | Beagle Cocker Spaniel Basset Hound | Labrador Retriever Colley Golden Retriever Rottweiler | Bouvier Bernois Terre-Neuve Saint Bernard |
À l’inverse, le Berger allemand, le Greyhound, le Yorkshire Terrier, le Doberman (...) font partie des races les moins prédisposées à l’obésité. |
Figure 1. Comparaison de la répartition masse maigre/masse grasse chez plusieurs chiens de grande taille (Royal Canin, 2003-2004).
Toutes les races ne sont pas égales en terme de risque nutritionnel durant la croissance. Les excès énergétiques prédisposent les chiens de petites races à la surcharge pondérale tandis que dans les grandes races, le risque majeur est représenté par les affections ostéo-articulaires (Grandjean & Paragon, 1996). L’association de troubles articulaires et d’un excès pondéral est fréquente en fin de croissance chez les grands chiens.
Le Bouvier Bernois figure parmi les chiens de races géantes les plus menacés par l’obésité. (© Renner).
Parmi les chiens de moyennes et grandes races, le Colley et le Labrador Retriever sont bien connus pour leur tendance à l’embonpoint. (© Hermeline).
Le Cairn Terrier et le Cavalier King Charles figurent parmi les chiens de petites races les plus menacés par l’obésité. (© Renner).
Facteurs génétiques
Un système complexe de facteurs génétiquement déterminés a pour but de maintenir un équilibre entre les apports alimentaires et les dépenses énergétiques. Ces mécanismes régulateurs sont particulièrement bien adaptés pour permettre la survie des espèces sauvages en période de famine. Néanmoins, en cas d’abondance alimentaire, pour les animaux domestiques placés dans un environnement confiné, il semble que ces facteurs ne permettent plus de maintenir l’équilibre entre apports et dépenses, d’où l’augmentation de la population d’individus obèses. Quoi qu’il en soit, certains individus deviennent obèses alors que d’autres, vivant dans les mêmes conditions, maintiennent leur poids idéal. Il n’est donc pas facile de faire la part entre facteurs environnementaux au sens large et prédisposition génétique (Johnson, 2000).
Les facteurs génétiques menant à l’obésité chez le chien sont encore mal compris. Il est cependant indéniable que ces facteurs jouent un rôle: l’obésité est particulièrement fréquente dans certaines races de chiens ainsi que dans certaines lignées. La nature polygénique de l’obésité ne fait guère de doute (Schalling et al., 1999).
L’âge
La fréquence de l’obésité augmente avec l’âge du chien (Robertson, 2003) et du propriétaire (Edney & Smith, 1986). Elle n’est que de 6 % chez les chiennes âgées de 9 à 12 mois mais de 40 % chez les individus adultes (Glickman et al., 1995). L’âge moyen lors du diagnostic varie de 5 à 8 ans. Avant 4 ans, moins de 20 % des chiens sont obèses, alors qu’ils sont plus de 50 % dans la catégorie des 7 à 8 ans et presque 70 % pour ceux âgés de 9 ans et plus (Meyer et al., 1978) (Tableau 4). Pour les animaux très âgés, une contradiction existe entre les chiffres cités par Mason (1970) et des données plus récentes qui montrent que la fréquence de l’obésité diminue chez les chiens âgés de plus de 12 ans (Armstrong & Lund, 1996).
La surcharge pondérale chez le chiot prédispose à l’obésité chez l’adulte. (© Doxicat ).
Les chiennes obèses entre 9 et 12 mois ont 1,5 fois plus de risques d’être des adultes obèses que des chiennes minces durant la croissance (Glickman et al., 1995). À titre de comparaison, chez l’homme, 80 % des adolescents obèses deviennent des adultes obèses qui sont plus gras que des adultes devenus obèses. En outre, les adultes obèses depuis le jeune âge possèdent une masse grasse plus importante que des individus dont l'obésité s'est développée après la fin de la croissance (Abraham & Nordseick, 1960). Ces données sont régulièrement confirmées par des études épidémiologiques (Eriksson et al., 2003).
Tableau 4 - Effet de l’âge sur la fréquence de l’obésité : % de chiens obèses dans les différentes classes d’âge | |||||||||||||
Lieu de l’étude | Âge (années) | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | 11 | 12+ |
UK | Mason, 1970 | 16.2 | 33.1 | 37.2 | 40.5 | ||||||||
Allemagne | Meyer et al., 1978 | 6.1 | 19 | 29.9 | 52.6 | 66.7 | |||||||
USA | Armstrong & Lund, 1996 | 19 | 41 | 43 | 44 | 45 | 46 | 42 | 43 | <35 |
Le sexe
Différentes données présentées dans le Tableau 5 montrent que les femelles sont plus prédisposées à l’obésité que les mâles. Dans certaines études, les femelles représentent plus de 60 % des chiens obèses (Krook et al., 1960; Jerico & Scheffer, 2002). Furthermore, Glickman et al. (1995) ont constaté, dans une étude concernant 289 chiennes adultes, un pourcentage d’obésité de 40 %.
Tableau 5 - Effets du sexe et de la stérilisation sur la fréquence de l’obésité | ||||||
Références | Mâles entiers | Mâles castrés | Mâles (total) | Femelles entières | Femelles stérilisées | Femelles (Total) |
Krook et al., 1960 | 38% | 62% | ||||
Mason, 1970 | 23% | 32% | ||||
Meyer et al., 1978 | 42% | 58% | ||||
Modifié d'après Edney Smith, 1986 (1) | 17% | 38% | 22% | 45% | ||
Jerico & Scheffer, 2002 (2) | 5% | 63% | ||||
Robertson, 2003 (3) | 26% | 25% | ||||
|
La stérilisation
La gonadectomie augmente la fréquence de l’obésité chez le mâle et surtout chez la femelle (Anderson, 1973; Edney, 1974; Karczewski et al., 1987; Miyake et al., 1988; Robertson, 2003). Edney and Smith (1986) avaient constaté que les chiennes stérilisées avaient deux fois plus de risques d’être obèses que les chiennes nonstérilisées. Une étude plus récente montre que cela concerne également les mâles. La fréquence de l’obésité est de respectivement 32 % et 15 % chez les animaux stérilisés et chez les chiens entiers, mâles et femelles confondus (Robertson, 2003). Les hormones sexuelles ne sont pas des régulateurs primaires du métabolisme mais elles influencent néanmoins le poids corporel de façon directe au niveau du système nerveux central, ou indirectement en modifiant le métabolisme cellulaire. De plus, les oestrogènes exercent un effet inhibiteur sur la prise alimentaire. La consommation alimentaire varie donc au cours du cycle chez la femelle. Elle est minimale lors de l’oestrus, augmente lors du metoestrus et est maximale lors de l’anoestrus (Houpt et al., 1979).
Différentes études tendent à montrer que les femelles sont plus prédisposées à l’obésité que les mâles. (© Alex German).
L’influence de la stérilisation précoce sur l’incidence de l’obésité est mal connue. Une étude épidémiologique américaine montre que la fréquence de l’obésité est plus faible dans une population de chiens stérilisés avant 5,5 mois que chez les animaux stérilisés entre 5,5 et 12 mois. Les auteurs rapportent par ailleurs une incidence globale de 27 % de chiens obèses dans la population stérilisée (Spain et al., 2004).
Bien qu’il soit difficile de clarifier le lien entre la stérilisation et l’obésité, en raison de la nature multifactorielle de celle-ci, plusieurs explications peuvent être avancées. Le premier point à considérer est la variation de l’ingestion alimentaire au cours du cycle ainsi que rapporté ci-dessus, et l’effet inhibiteur des oestrogènes sur la consommation alimentaire. Il est logique de penser que chez les chiennes stérilisées, cet effet inhibiteur ne s’exerce plus jamais. Au cours d’une période de 3 mois suivant la stérilisation, 4 femelles Beagle ont consommé 20 % d’aliments de plus que les animaux témoins non stérilisés et leur poids a significativement augmenté (Houpt et al., 1979). Une autre étude s’est attachée à ce problème, en mesurant non pas la prise de poids chez les femelles stérilisées mais bien les quantités d’énergie nécessaires pour maintenir le poids corporel - considéré comme idéal - de chiennes de race Beagle. Une diminution de 30 % des apports énergétiques journaliers par rapport au rationnement avant la stérilisation s’est avérée nécessaire dans les semaines suivant l’ovariohystérectomie pour maintenir les chiennes à leur poids idéal (Jeusette et al., 2004a). Ce niveau de restriction énergétique paraît élevé mais une des explications avancées est que le Beagle est particulièrement prédisposé à l’obésité. La stérilisation entraînerait également une diminution de l’activité spontanée, principalement chez les mâles. Ce dernier point est difficile à quantifier en chenil.
Estimation de l’importance de la stérilisation dans la population canine aux États-Unis (Texas) (D'après Mahlow, 1999) | |
Population canine | Taux de stérilisation |
Population totale | 26.9% |
Mâles | 22.6% |
Femelles | 31.4% |
Il existe de grandes disparités entre les pays. Au Japon, comme aux États-Unis, environ 30 % des chiens sont stérilisés, mâles et femelles confondus. Ce pourcentage est beaucoup plus faible en Europe mais les données précises font défaut. |
La prise de poids après la stérilisation pourrait donc être empêchée par des mesures alimentaires strictes et un exercice régulier. Dans une étude avec des Bergers allemands entraînés à la course d’obstacle et utilisés comme chiens de patrouille, aucune différence de poids corporel n’a été mise en évidence entre les chiennes entières ou stérilisées bien que toutes recevaient la même quantité d’aliments (Le Roux, 1983). Cette donnée tend à prouver que le maintien d’un exercice régulier après la stérilisation peut prévenir la prise de poids.
L’importance de la stérilisation dans la population canine peut expliquer l’augmentation de la fréquence de l’obésité depuis les premières études épidémiologiques, en 1960. De plus, comme cette pratique devient de plus en plus courante, il faut probablement s’attendre à une augmentation de la fréquence dans les prochaines années, y compris dans des pays jusqu’ici peu touchés par l’obésité.
Les traitements contraceptifs
Le traitement contraceptif à l’acétate de médroxyprogestérone a entraîné une prise de poids significative chez 17,4 % des chiennes traitées lors d’un essai clinique. Les auteurs ont rapporté de la boulimie et de l’obésité chez quelques animaux (Picavet & Le Bobinnec, 1994). L’augmentation de poids consécutive à la prise de ce traitement contraceptif est par ailleurs largement documentée chez la femme (Harel et al., 1996).
Obésité et maladies endocriniennes
L’obésité peut être associée à certaines maladies endocriniennes comme le diabète (Krook et al., 1960; Mattheeuws et al., 1984a; Wolfscheimer, 1990; Ford et al., 1993; Hoenig, 2002) et l’hypothyroïdie (Kaelin et al., 1986; Forbes & White, 1987; Roche et al., 1991; Ford et al., 1993; Panciera, 1994, 2001; Dixon et al., 1999). Selon les auteurs, au moins 40 % des chiens souffrant d’une de ces affections sont obèses. L’obésité peut également être secondaire à l’hyperadrénocorticisme. Dans une étude clinique, 5 chiens sur 8 présentaient des dépôts de graisses typiques de l’obésité et différents de l’abdomen pendulaire (Spearman & Little, 1978).
L’obésité secondaire à la prise de médicaments
Certains traitements médicamenteux peuvent entraîner une hyperphagie et secondairement, une surcharge pondérale; il s’agit notamment des antiépileptiques et des glucocorticoïdes.
La sédentarité et le manque d’exercice
Le manque d’exercice est un facteur primordial dans le développement de l’obésité: la prévalence de l’obésité décroît de façon proportionnelle à la durée de l’exercice hebdomadaire. Il est cependant impossible de déterminer si l’obésité est responsable d’une restriction de l’exercice ou si c’est le manque d’exercice qui a constitué un des facteurs responsables de l’obésité (Robertson, 2003). La durée de l’exercice hebdomadaire est un critère plus précis que le type d’habitat pour évaluer les dépenses énergétiques.
Il y a généralement plus de chiens obèses parmi les chiens vivant en appartement que parmi les chiens vivant à l’extérieur (Robertson, 2003). Néanmoins, il est erroné de croire que la disposition d’un grand jardin augmente systématiquement les dépenses énergétiques. Certains animaux vivant dans un environnement confiné sont promenés plusieurs heures par semaine alors que d’autres, disposant d’un jardin, se contentent d’en profiter quelques minutes par jour.
Berger allemand. Une activité physique régulière est efficace pour prévenir l’obésité. (© Renner).
Le type d’alimentation
Les causes alimentaires suivantes ont été clairement identifiées: apports alimentaires ne tenant pas compte des besoins en énergie ("le chien mange tout ce que je lui donne") et suppléments sous forme de friandises ou de compléments non comptabilisés dans les apports énergétiques. La distribution d’aliments très appétents, riches en matières grasses et en glucides rapidement assimilables prédispose également à l’obésité. Un facteur de risque indéniable est l’alimentation ad libitum entraînant une surconsommation énergétique.
Les aliments peuvent être très appétents en raison de la présence d’arômes ou de quantités importantes de matières grasses. Les aliments les plus gras sont également les plus concentrés en énergie. Le chien, même s’il tolère et utilise bien les matières grasses comme sources d’énergie, est aussi capable de les stocker, sous forme de graisse abdominale dans un premier temps.
Augmenter de 8 % l’apport énergétique sous forme lipidique, sans modifier les apports énergétiques totaux, entraîne une augmentation significative du dépôt de graisse abdominale, sans modification du poids corporel des chiens (Kim et al., 2003). Chez l’homme aussi, l’apport de matières grasses est le principal déterminant du développement de l’obésité (Garaulet et al., 2001). Chez le chien, les aliments hyperdigestibles, pauvres en fibres alimentaires et très denses en énergie, peuvent aussi être responsables d’une augmentation pondérale. La distribution de friandises, de restes de repas des propriétaires et de compléments nutritionnels divers est un facteur de risques supplémentaires (Kienzle et al., 1998; Robertson, 2003).
Teckel. Beaucoup de petits chiens passent l’essentiel de leur temps à l’intérieur de l’habitation ; En Asie, 65 % des petits chiens auraient un mode de vie "100 % Indoor" : le chien ne sort pas et utilise une litière, comme un chat. (© Doxicat/Hermeline).
Une controverse existe quant à l’influence des rations ménagères sur le développement de l’obésité canine (Lewis, 1978). L’idée sous-jacente est que les chiens qui reçoivent des rations ménagères seraient plus souvent "récompensés" par des friandises et recevraient des quantités plus importantes de nourriture. Ce point ne peut être défendu que dans les pays où on nourrit encore les chiens de façon "traditionnelle", avec des rations ménagères ou des restes de table. Sur le continent nord-américain, 95 % des animaux reçoivent des aliments industriels et cependant l’obésité canine ne semble pas être moins répandue que dans certains pays d’Europe, bien au contraire (Lund et al., 1999).
Une étude épidémiologique n’a pas montré d’influence particulière d’un type d’aliment (humide versus sec) sur la fréquence de l’obésité (Robertson, 2003).
Chienne Braque d’Auvergne. L’hypothyroïdie est fréquemment associée à l’obésité. (© Diez).
Contrairement à certaines idées reçues, la distribution en plusieurs repas d’une ration journalière adaptée n’entraîne pas d’augmentation de la fréquence de l’obésité. Dans les études épidémiologiques, les chiens obèses sont généralement nourris une seule fois par jour (Kienzle et al., 1998; Robertson, 2003). Il ne faut bien sûr pas confondre division d’une ration journalière appropriée et multiplication des apports de friandises diverses s’y ajoutant.
La dimension sociale de l’aliment
La place de l’alimentation dans la relation entre l’homme et le chien joue un rôle majeur dans le développement de l’obésité.
Parmi les facteurs sociologiques, une étude réalisée en Allemagne (Kienzle et al., 1998) montre que la relation entre l’homme et le chien obèse est caractérisée par un comportement anthropomorphique excessif. Par exemple, les propriétaires d’animaux obèses parlent plus à leur chien, acceptent leur animal dans leur lit, ne craignent pas les zoonoses et considèrent que l’exercice, le travail ou la fonction de protection du chien sont peu importants. Il n’est donc pas étonnant de constater que les animaux obèses reçoivent plus fréquemment des repas ou des friandises que les animaux de poids normal. Cette étude confirme que les propriétaires sont souvent obèses (54 % versus 28 % pour des propriétaires de chiens d’un poids normal), ainsi que précédemment rapporté (Mason, 1970; Kronfeld, 1988) et assez inactifs. Les propriétaires d’animaux obèses traduisent toute demande de l’animal comme étant une demande de nourriture. Ces propriétaires se soucient évidemment peu d’une alimentation équilibrée. Certains de ces aspects sont bien connus des praticiens mais cette étude a eu le mérite de l’objectiver par un questionnaire (Kienzle et al., 1998).
Chiots Saint-Bernard. L’alimentation ad libitum doit être déconseillée : la plupart des chiens sont incapables de réguler leur consommation alimentaire. Mieux vaut donner à manger séparément à des chiots d’une même portée au sevrage. (© Psaïla).
Les données présentées ci-dessus peuvent paraître assez décourageantes au premier abord, et elles ne permettent pas de différencier clairement les simples corrélations (par exemple, entre le poids du propriétaire et le poids du chien) et les causes de l’obésité. Elles sont cependant très utiles pour le développement de moyens de prévention et de traitement de l’obésité canine. Elles permettent d’attirer l’attention sur des facteurs environnementaux au sens large, a priori extérieurs à l’animal lui-même, mais primordiaux pour la santé de l’animal.
Les propriétaires de chiens obèses peuvent aussi interpréter la boulimie comme étant un signe de bonne santé (Kronfeld, 1988) et l’excès pondéral comme un signe de beauté dans certaines races. Certains propriétaires commettent également l’erreur d’utiliser les aliments comme palliatifs pour éviter que les animaux non surveillés ne s’ennuient ou détruisent des objets. Enfin, pour un chien vivant en milieu familial, recevoir de la nourriture des enfants (récompenses, jeux…) peut constituer une mauvaise habitude. La possession de plusieurs animaux peut poser problème pour le contrôle des consommations alimentaires individuelles. Néanmoins, contrairement à une idée reçue, la fréquence de l’obésité est supérieure dans les foyers possédant un seul chien (Kienzle et al., 1998; Robertson, 2003).
En conclusion, il apparaît que les besoins énergétiques des chiens sont souvent mésestimés et que les apports peuvent donc être excessifs dans de nombreuses situations. Il appartient au clinicien de déterminer si la surcharge pondérale est primaire ou secondaire pour orienter son traitement en conséquence.
Dans un effectif de plusieurs chiens, même s'ils sont de même race, un rationnement individuel est nécessaire. (© Campus Royal Canin).
Pathologie associée à l’obésité
Jusqu’à la fin des années 80, il existait relativement peu de données cliniques concernant les affections liées à l’obésité chez le chien. Les résultats des études épidémiologiques réalisées chez l'homme ont donc souvent été extrapolés au chien. Cependant, la simple transposition des données humaines (diabète, hypertension...) au chien obèse n’est pas satisfaisante. Il faut étudier les données cliniques concernant les chiens obèses qui sont maintenant plus fréquemment publiées. Un résumé est présenté dans le Tableau 6.
Tableau 6 - Pathologie associée à l’obésité canine | |
Facteurs prouvés | Facteurs controversés |
Diminution de la longévité Maladies ostéo-articulaires Intolérance à l’effort Troubles cardio-respiratoires Diabète sucré Baisse de l’immunité Hyperlipidémies et dyslipidémies Dystocies Tumeurs mammaires Dermatite à Malassezia Difficultés de mise en oeuvre des techniques exploratoires Risque accru lors d’anesthésie Modifications de la fonction thyroïdienne | Incontinence et calculs urinaires Troubles de la reproduction Autres tumeurs Autres dermatoses |
Diminution de la longévité
Il a été clairement démontré que la surcharge pondérale entraînait une diminution de la longévité chez le chien. Kealy et al. (2002) ont suivi une cohorte de 48 Labradors, dont la moitié a reçu tout au long de sa vie des quantités limitées d’aliments. Au départ, un groupe de chiens a été nourri ad libitum avec un aliment de croissance et le second groupe a reçu 75 % des apports énergétiques du groupe nourri à volonté. Le poids corporel de tous les animaux du groupe ad libitum, comme du groupe restreint en énergie, a augmenté jusqu’à l’âge de 3 ans et 4 mois pour atteindre respectivement les valeurs moyennes de 35 et 27 kg. À ce stade, 2 modifications alimentaires ont été introduites: distribution d’un aliment moins concentré en énergie pour tous les chiens et restriction des apports (distribution d’une quantité fixe de nourriture) pour le groupe initialement nourri ad libitum, le second groupe continuant à recevoir 25 % d’énergie en moins.
La modification du protocole expérimental a induit une diminution du poids corporel de tous les chiens qui s’est ensuite stabilisé. À l’âge de 5 ans, la différence moyenne était de 10 kg entre les 2 groupes de chiens. À l’âge de 8 ans, l’indice corporel était évalué à 6,8/9 chez les chiens mangeant le plus contre 4,5/9 chez les chiens témoins (l’indice corporel était noté de 1- cachexie à 9 - obésité morbide).
À l’âge de 12 ans, les apports énergétiques moyens des chiens témoins et des chiens recevant 75 % des apports étaient respectivement de 1745 et 1352 kcal, soit environ, 127 et 115 kcal/kg Poids Corporel (PC)0,75. Les chiens du second groupe pesaient en moyenne 26 % de moins que ceux du groupe témoin. La restriction alimentaire a permis d’augmenter la longévité, la portant à 13 ans au lieu de 11,2 ans chez les animaux témoins. La restriction énergétique a permis de retarder le développement des maladies chroniques et plus particulièrement l’arthrose. De plus, différents paramètres métaboliques (insuline, glucose, lipides sanguins), étaient aussi favorablement influencés chez les chiens recevant 25% d’énergie de moins. L’étude relatée ci-dessus est extrêmement importante en terme d’apport scientifique: elle a confirmé une relation indiscutable entre apport énergétique et longévité chez le chien. Elle constitue un plaidoyer contre l’alimentation ad libitum et fournit de précieuses données montrant les conséquences de l’excès pondéral sur le développement des maladies ostéo-articulaires.
L’effet positif de la restriction énergétique sur l’espérance de vie a également été observé chez l’homme:les individus présentant un indice de masse corporelle moyen ont une longévité plus élevée que les individus en excès pondéral (Manson et al., 1987).
La consommation alimentaire des chiots de grandes races doit être surveillée depuis le plus jeune âge. (© Renner).
Affections ostéo-articulaires
La surcharge pondérale prédispose à la pathologie locomotrice chez les animaux de tous âges (Figure 2 et Chapitre 11). Chez les chiots de grandes races en croissance, l’excès pondéral lié à une surconsommation alimentaire génère l’apparition de troubles orthopédiques divers ou révèle une dysplasie clinique de la hanche (Kealy et al., 1992). Les symptômes de troubles ostéo-articulaires liés à un excès pondéral sont généralement observés après l’âge de 6 mois. Dans de nombreux cas, les lésions sont irréversibles.
Figure 2. Relation entre la pathologie orthopédique et l’obésité : répartition des chiens hospitalisés en fonction de leur score corporel: Échelle de 1 (cachexie) à 9 (obésité avérée) (Lhoest et al., 2004).
Dans l’étude de Kealy et al., relatée ci-dessus, les signes radiologiques d’arthrose coxofémorale ont été étudiés chez les Labradors depuis l’âge de 4 mois. Ils sont progressivement devenus plus fréquents chez les Labradors nourris ad libitum que chez les chiens à consommation énergétique restreinte (52 % versus 13 % à l’âge de 5 ans). Chez les Labradors âgés de 8 ans et plus, la maladie chronique la plus fréquente était l’arthrose articulaire, affectant plusieurs articulations (épaule, coude, hanche, jarret): 90 % des Labradors en ont été atteints (Kealy et al., 1997, 2000, 2002). L’étude a montré que la sévérité de l’arthrose était plus grande dans le groupe initialement nourri à volonté.
D’autres affections orthopédiques sont fréquentes chez les chiens obèses (Janicki & Sendecka, 1991) : la rupture des ligaments croisés et les fractures du condyle de l’humérus ont fait l’objet d’une large étude épidémiologique chez le Cocker Spaniel. Sur un ensemble de 854 animaux, les chiens souffrant de l’un ou l’autre des 2 troubles orthopédiques présentaient un poids corporel supérieur à celui de la population saine. De façon assez surprenante, c’était l’inverse pour ceux souffrant de maladies discales (Brown et al., 1996).
Chez les chiens atteints d’affections ostéo-articulaires, un cercle vicieux s’installe : l’animal a tendance à réduire son activité, ce qui entraîne suralimentation et surcharge pondérale si l’apport énergétique n’est pas adapté. Par ailleurs, l’observation d’une affection articulaire (par exemple, la rupture d’un ligament croisé) est certes une indication majeure pour faire maigrir un chien obèse, mais elle peut également contrecarrer l’amaigrissement en rendant l’exercice impossible.
Lésions de dysplasie importantes à gauche avec subluxation et arthrose. L’obésité est un facteur révélateur ou aggravant de la dysplasie de la hanche. La restriction énergétique permet de retarder l’apparition et le développement des différentes formes d’arthrose. (© HAW Hazewinkel).
Intolérance à l’effort et troubles cardio-respiratoires
Les symptômes associés à l’obésité sont principalement une intolérance à l’effort (De Rick & De Schepper, 1980) et des troubles respiratoires (Ettinger, 1983). Il existe aussi une relation entre la fréquence d’apparition du collapsus trachéal et l’obésité, même si d’autres facteurs tels que la race montrent un plus grand degré de corrélation (O'Brien et al., 1966; White & Williams, 1994).
Une étude terrain a montré que lorsqu’un amaigrissement est obtenu, le propriétaire remarque inévitablement un changement de comportement du chien: plus alerte et plus joueur (données Royal Canin 2001, obtenues sur 13 chiens souffrant d’obésité depuis plus d’un an et suivis pendant 10 mois au moins).
L’augmentation du poids chez le chien s’accompagne d’une augmentation du rythme cardiaque, du volume ventriculaire, de la pression sanguine et du volume plasmatique (Rocchini et al., 1987; Mizelle et al., 1994; Massabuau et al., 1997). La relation entre obésité et hypertension est cependant controversée. Il existerait chez le chien, une relation entre l’âge et l’augmentation de la tension artérielle mais pas entre l’obésité et l’hypertension (Bodey & Michell, 1996). Le chien a cependant été utilisé comme modèle expérimental pour étudier la pathogénie de l’hypertension induite par l’augmentation de poids et l’insulinorésistance associée (Verwaerde et al., 1997; Truett et al., 1998).
Lors de surcharge pondérale, la fréquence des affections cardio-vasculaires est augmentée. Quelques études cliniques rapportent les maladies suivantes: thrombose de la veine porte (Van Winkle & Bruce, 1993), hypoxie du myocarde (Baba & Arakana, 1984) ou endocardiose valvulaire (Valtonen & Oksanen, 1972; Edney & Smith, 1986).
Les effets cardio-vasculaires décrits ci-dessus intéressent également les néphrologues (Alonso-Galicia et al., 1995; Joles, 1998). L’hypertension peut-elle à terme entraîner des modifications de la fonction rénale? Une étude clinique a montré que chez des chiens suralimentés durant 6 mois avec un régime riche en matières grasses animales, la surcharge pondérale (plus 58 % par rapport aux animaux témoins) s’est accompagnée d’une augmentation du poids des reins (plus 31 %), de la tension artérielle, du taux de filtration glomérulaire, du débit sanguin rénal et de diverses lésions histologiques rénales. Les auteurs ont conclu en supposant que les lésions et les anomalies observées pourraient être plus sévères dans le cas d’une obésité prolongée (Henegar et al., 2001). Dans cette étude, les effets très négatifs pourraient être dus non seulement à une influence des matières grasses alimentaires, mais également à leur composition.
Bulldog Anglais. Les chiens obèses seraient plus susceptibles que les non obèses de présenter un coup de chaleur suite à une augmentation de la température extérieure (© Lanceau).
Diabète
Les chiens diabétiques peuvent présenter de l’hyperphagie entraînant une augmentation pondérale dans un premier temps. Les relations entre l’obésité et le métabolisme glucidique sont complexes mais il est évident que l’obésité entraîne de profonds changements dans le métabolisme du glucose et la sécrétion d’insuline (Mattheeuws et al., 1984a, b). Il a été établi que la sécrétion d’insuline, l’insulinémie et l’intolérance au glucose augmentaient proportionnellement au degré d’obésité: l’origine en est l’installation d’un état d’insulinorésistance dont une des composantes serait un état inflammatoire chronique (Festa et al., 2001). Le modèle de chien suralimenté avec une ration riche en lipides a d’ailleurs été largement utilisé pour étudier le syndrome d’insulinorésistance. En effet, lors de l’induction de l’obésité chez le chien, obtenue par exemple en nourrissant ad libitum avec une ration riche en matières grasses, une résistance à l’insuline se développe progressivement, en relation avec une augmentation de l’adiposité (Rocchini et al., 1987; Bailhache et al., 2003a; Kim et al., 2003) et une augmentation de la production de cytokines adipocytaires (Gayet et al., 2002, 2003b, 2004a, b; Jeusette et al., 2004b).
Il n’est pas clairement établi que l’obésité est un facteur de risque de développement du diabète sucré chez le chien. Néanmoins, l’augmentation actuelle de l’incidence du diabète sucré chez le chien pourrait le laisser supposer (Hoenig, 2002). (© Faculté de Médecine Vétérinaire de Liège).
Diminution de l’immunité
Les animaux obèses ou nourris avec un régime à haute teneur en matières grasses résistent moins aux infections que leurs congénères nourris de façon équilibrée (Newberne, 1966, 1973; Williams & Newberne, 1971; Fiser et al., 1972).
Hyperlipidémies et dyslipidémies
Selon Joshua (1970), une infiltration graisseuse du foie peut être observée chez les chiens obèses. Une étude épidémiologique montre par ailleurs que l’excès pondéral augmente le risque de pancréatite aiguë (Hess et al., 1999). Des résultats montrent surtout des profondes perturbations du métabolisme lipidique. Les chiens obèses présentent une augmentation des concentrations plasmatiques en lipides: cholestérol, triglycérides et phospholipides sans pour autant dépasser les valeurs de références pour ces différents paramètres (Chikamune et al., 1995; Bailhache et al., 2003b; Diez et al., 2004). Il a également été observé une augmentation des teneurs en acides gras non estérifiés et des modifications des lipoprotéines (augmentation des triglycérides dans les VLDL et les HDL, diminution du HDL cholestérol et augmentation du VLDL cholestérol) (Bailhache et al., 2003a, b). Les conséquences de ces modifications bien connues chez l’homme restent néanmoins à évaluer chez le chien.
Incontinence et calculs urinaires
L’hypothèse d’une relation entre l’obésité et certaines formes d’incontinence urinaire, principalement chez les chiennes stérilisées, a été évoquée mais demeure sujette à controverse (Gregory, 1994). Certaines chiennes deviennent incontinentes après être devenues obèses et, inversement, l’amaigrissement permettrait de résoudre le problème. Dans certains cas, l’incontinence aurait à nouveau été observé chez les chiennes qui auraient repris du poids après un régime. Une hypothèse avancée est que la présence de graisse rétropéritonéale pourrait exercer des effets mécaniques sur le système urinaire chez la chienne (Holt, 1987). Cependant, il faut aussi prendre en compte le fait que les femelles stérilisées ont deux fois plus de risques d’être obèses que les femelles entières, ce qui expliquerait la relation possible entre incontinence urinaire et stérilisation. Le débat est loin d’être clos.
Les chiens présentant une surcharge pondérale seraient également plus exposés au risque de développer des calculs urinaires d’oxalate de calcium (Lekcharoensuk et al., 2000).
Troubles de la reproduction
La relation entre obésité et troubles de la reproduction n’est pas claire, même s’il est admis que l’excès de graisse peut entraîner des dystocies (Edney & Smith, 1986; Sonnenschein et al., 1991; Glickman et al., 1995).
Chienne et chiots Bergers allemands. Chez l’homme, il a été montré que l’obésité réduit la fertilité (Pasquali et al., 2003). C’est peut-être également le cas chez le chien. (© Renner).
Cancers
La relation entre l’obésité et le développement de certains cancers (sein, utérus, côlon et prostate) est bien établie chez l’homme (National Institute of Health, 1998). En revanche, chez le chien, le manque de données cliniques ne permet pas d’établir de tels liens si ce n’est avec les tumeurs mammaires.
Les premières données ont été publiées en 1991. Selon Sonnenschein et al., l’obésité ou la consommation d’un régime riche en matières grasses un an avant le diagnostic n’augmente pas le risque de cancer mammaire chez les chiennes adultes, intactes ou stérilisées. Ces résultats ont été contredits par Perez Alenza et al. (1998, 2000). En revanche, chez les femelles stérilisées, le risque est diminué chez les individus qui étaient minces entre 9 et 12 mois (Sonnenschein et al., 1991) et augmenté chez les femelles obèses à l’âge d’un an (Perez Alenza, 1998, 2000). Dans l’ensemble, ces auteurs ont conclu que l’état d’embonpoint chez les animaux juvéniles jouait certainement un rôle dans la prédisposition au développement de tumeurs mammaires à l’âge adulte.
Une étude rétrospective n’a pas confirmé ces résultats (Philibert et al., 2003). Tout d’abord, il n’a pas été possible d’analyser l’effet de l’obésité précoce sur le développement des tumeurs mammaires. Ensuite, les auteurs n’ont rapporté aucune association entre obésité et développement de tumeurs, ni entre obésité et durée de survie (10 mois pour les chiennes obèses versus 14 mois pour les autres).
Affections dermatologiques
Dans les nombreuses revues de synthèse traitant de l’obésité canine, il est souvent mentionné que les troubles cutanés sont plus fréquents chez les chiens obèses que chez les chiens sains. Paradoxalement, il n’existe pas à notre connaissance d’étude démontrant ce fait chez le chien, à une exception près: dans une étude clinique faite sur 29 chiens atteints de dermatite due à Malassezia pachydermatis, l’obésité est identifiée comme un facteur de risque significatif pour le développement de cette dermatite (Pak-Son et al., 1999).
Selon Edney & Smith (1986), la relation entre troubles cutanés et obésité n’est pas claire.
Techniques exploratoires
Il est plus difficile de mettre en oeuvre certaines techniques exploratoires chez les chiens obèses que chez les chiens sains: l’auscultation, la palpation ou la radiographie sont compliquées par l’excès de graisse sous-cutanée ou abdominale (Joshua, 1970).
Inconvénients opératoires
Les risques liés à l’anesthésie sont plus importants chez les chiens obèses mais variables selon le type d’anesthésique utilisé. Les risques majeurs sont le surdosage et l’allongement de la période de récupération en raison du stockage des anesthésiques liposolubles dans les graisses corporelles. Les autres risques sont liés aux maladies associées, fréquentes chez les patients obèses: troubles circulatoires, respiratoires et hépatiques (Clutton, 1988). Enfin, lors d’une étude contrôlée sur les temps opératoires chez des chiennes subissant une ovariectomie, le temps d’intervention a été significativement plus long chez les chiennes obèses, en moyenne de l’ordre de 30 % (Van Goethem et al., 2003).
Chez l’homme obèse, le risque opératoire est augmenté en raison des diverses anomalies rencontrées: perturbations de la fonction respiratoire (diminution de la capacité respiratoire, hypoventilation), circulatoire (hypertension et cardiomégalie) ou autres (difficultés à intuber ou à maintenir l’équilibre hydrique). Les complications postopératoires sont également plus fréquentes chez les patients obèses (Fisher et al., 1975).
Réversibilité des troubles
- L’intolérance à l’effort, l’inactivité, les troubles locomoteurs et respiratoires rapportés par les propriétaires sont généralement atténués ou peuvent même disparaître totalement suite à la perte de poids (Gentry, 1993; Diez et al., 2002, 2004).
- Il en va de même pour certains troubles du rythme cardiaque (Baba & Arakana, 1984).
- L’incontinence urinaire peut également être diminuée ou disparaître totalement à la suite d’un régime (Holt, 1987).
- Des études récentes ont montré la réversibilité des principaux troubles métaboliques, notamment l’insulino-résistance et les perturbations du métabolisme lipidique (Gayet et al., 2003a, 2004a, b; Jeusette et al., 2004b).
Modifications de la fonction thyroïdienne
La fonction thyroïdienne a été explorée respectivement chez des chiens obèses, en comparaison à un groupe de chiens sains, et ensuite au cours d’un protocole d’amaigrissement lent. Les concentrations de certaines hormones thyroïdiennes étaient plus élevées chez les chiens obèses mais par la suite, elles ont diminué au cours du protocole d’amaigrissement. Les auteurs concluent que l’obésité et la restriction énergétique altèrent la fonction thyroïdienne mais que ces modifications ne devraient pas altérer l’interprétation des essais cliniques (Daminet et al., 2003).
Physiopathologie de l’obésité
En termes simples, l’obésité est la conséquence d’un déséquilibre énergétique: les apports ont été supérieurs aux dépenses pendant une durée variable, ce qui a entraîné un bilan positif. De très nombreux facteurs peuvent engendrer cette situation et l’on considère que les interactions entre ces facteurs - plutôt que l’action d’un seul - sont responsables de l’obésité.
L’équilibre énergétique
Les principes de l’équilibre énergétique
Le principe fondamental du bilan est le suivant:
Modifications des réserves = Apports énergétiques - Dépenses énergétiques
Un bilan énergétique positif est la conséquence d’apports énergétiques supérieurs aux dépenses, et inversement, le bilan est négatif si les dépenses excèdent les apports. Dans les circonstances normales, le bilan énergétique oscille repas après repas, jour après jour, semaine après semaine, sans changement à long terme du poids corporel et des réserves énergétiques. De nombreux mécanismes physiologiques interviennent pour adapter les apports aux dépenses et les dépenses aux apports afin de maintenir le poids corporel stable à long terme dans les deux cas. Si le bilan énergétique est positif, la dépense s’accroît (cycles futiles, protéines découplantes…) et inversement, quand le bilan est négatif, l’organisme a tendance à réduire ses dépenses (ce qui contribue à la résistance à l’amaigrissement).
Les apports énergétiques
L’apport énergétique total provient de tous les aliments ingérés, digérés et métabolisés par le corps. Le Tableau 7 montre les apports énergétiques via les différents nutriments fournisseurs d’énergie. Les coefficients utilisés sont dérivés de ceux de Atwater, et comportent un certain risque d’erreur puisqu’ils ne tiennent compte que d’une digestibilité moyenne. Les lipides apportent plus d’énergie par unité de poids que les glucides digestibles ou les protéines. Chez les carnivores, les fibres alimentaires sont peu digérées et leur apport énergétique est négligé. Il faut cependant noter qu’on attribue chez l’homme à la fibre digestible une valeur énergétique de 1 à 2 kcal/g. Chez le chien, certaines fibres solubles sont totalement digérées (Diez et al., 1998) et l’acétate pourrait contribuer au métabolisme énergétique du chien à hauteur de 8 % (Pouteau et al., 1998).
Tableau 7 - Apports énergétiques des différentes catégories de nutriments (Martin, 2001) | |||
1 g de glucides | 1 g de protéines | 1 g de lipides | |
Énergie Brute | 4.2 kcal | 5.4 kcal | 9.4 kcal |
Énergie digestible | 3.7 kcal (88%) | 4.8 kcal (89%) | 8.5 kcal (90%) |
Énergie métabolisable | 3.5 kcal (83%) | 3.5 kcal (65%) | 8.5 kcal (90%) |
Valeur énergétique réelle (énergie nette) | 3.2 kcal (76%) | 2.2 kcal (41%) | 8.2 kcal (87%) |
Les rendements exprimés en % sont calculés à partir de l’énergie brute. |
Les dépenses énergétiques
Le second élément de l’équation est constitué par les dépenses énergétiques, qui sont divisées en 3 composantes:
- le métabolisme de base (le BMR ou Basal Metabolic Rate pour les Anglo-Saxons),
- la thermogenèse postprandiale (production de chaleur consécutive au repas),
- l’activité physique.
L’équation la plus souvent utilisée pour calculer le besoin énergétique d’entretien théorique est :
- 32 kcal par Kg de poids métabolique (PM)*
* Avec PM = (poids corporel) 0,73
Cet exposant est souvent arrondi à 0,75 pour faciliter les calculs mais la valeur originale est 0,73.
Chez l’homme adulte sédentaire, le métabolisme de base, la thermogenèse postprandiale et l’activité physique représentent respectivement 60, 10 et 30 % des dépenses énergétiques (WHO, 1997). La contribution de chacune de ces composantes varie néanmoins de façon importante selon la régularité et l’intensité de l’activité physique qui constitue la variable clé de la dépense. Le métabolisme de base semble en revanche être un facteur individuel stable, en majeure partie déterminé par l’importance de la masse musculaire de l’organisme (90 - 95 % des dépenses énergétiques du métabolisme de base contre 5 à 10 % pour la masse grasse).
Chez le chien, le métabolisme de base représenterait également entre 55 et 70 % de la dépense totale (NRC, 2006), mais des différences sont constatées entre les races. À titre d’exemple, le Labrador a un métabolisme de base moindre que le Dogue allemand ou l’Épagneul. Le vieillissement diminue le métabolisme de base chez le chien (Speakman et al., 2003). Il est conseillé de réduire l’apport énergétique de 10 à 15 % à partir de 7 ans, tout en ajustant la ration en fonction de la condition corporelle de l’individu. En revanche, un régime hypoénergétique ne se justifie absolument pas systématiquement pour tous les chiens âgés.
L’équilibre nécessaire entre apports et dépenses énergétiques est bien le noeud du problème chez le chien en général et chez l’animal obèse en particulier. Les difficultés dans l’estimation des dépenses (besoins) énergétiques sont de plusieurs natures.
Tout d’abord la grande diversité de l’espèce canine: les poids corporels varient entre les extrêmes de 1 à plus de 100 kg. Il est aisé de comprendre la difficulté d’estimer le besoin énergétique de tous les chiens par une équation unique et simple. L’équation moyenne est de 132 kcal/kg PC0,75(NRC, 1974). Une première approche proposée a été de grouper les races en fonction de leur poids et de leur taille: races petites, moyennes, grandes et géantes.
Des chiens de poids ou de taille comparables, classés dans la même catégorie, peuvent présenter des besoins énergétiques très différents. Les différences peuvent être dues à l’épaisseur du pelage, à la composition corporelle (rapport masse maigre/masse grasse) ou au type de sélection opéré (chien de travail au départ, ensuite sélectionné sur des critères de beauté et ayant pour fonction de servir d’animal de compagnie). La composition corporelle est extrêmement importante: les chiens qui présentent une plus grande masse musculaire ont une dépense énergétique plus élevée et sont moins susceptibles de devenir obèses que les chiens plus gras.
La race peut influencer fortement le besoin énergétique, même à poids équivalent et dans des conditions d’environnement semblables. Par rapport à un rationnement théorique (NRC 1974), il est prudent de diminuer la ration d’environ 10 % chez un Terre-Neuve. Chez un Dogue allemand au contraire, la ration doit souvent est augmentée de 40 % pour maintenir son poids. (©Royal Canin/J.-P. Lenfant et Royal Canin/Renner).
Outre la race, des facteurs individuels, génétiques ou non, génèrent aussi une grande diversité dans les besoins énergétiques. Dans une même race, pour des chiens de poids comparables, les mâles sont en général un peu moins gras que les femelles et ont donc une dépense supérieure (de l’ordre de 10 %); ce dernier point est cependant controversé (Kienzle & Rainbird, 1991).
Comme cela a déjà été évoqué, la castration a pour conséquence une diminution des dépenses (de l’ordre de 20 à 30 %) (Figure 3). Le vieillissement de l’animal est un exemple de condition physiologique qui peut faire diminuer les dépenses énergétiques en abaissant le métabolisme de base. De plus, rappelons que lors du vieillissement, la composition corporelle change: la masse grasse a tendance à augmenter aux dépens de la masse musculaire.
Les dépenses énergétiques liées à l’activité physique n’ont pas été quantifiées chez le chien. D’un point de vue pratique, il est impossible de dire à combien de kilocalories correspond une heure de promenade, de course ou de chasse.
Figure 3. Évolution du poids moyen de chiens beagle après stérilisation (Jeusette et al., 2004a).
Dans un environnement thermique neutre, pour les chiens vivant à l’intérieur, les dépenses énergétiques liées à la thermorégulation sont peu importantes. L’effet saisonnier est donc négligeable. En revanche, pour les chiens maintenus en chenil extérieur, lorsque la température extérieure varie, la dépense énergétique augmente pour maintenir la thermorégulation. Dans la littérature, la quantification de la dépense énergétique supplémentaire est cependant controversée. Par exemple, chez le Berger allemand, une variation de 1 °C s’accompagne d’une variation du besoin énergétique de l’ordre de 1 % (Manner, 1991). D’autres données font état d’une augmentation de 2,3 à 3,8 % et par degré en dessous de la zone de neutralité thermique (NRC, 2006).
En conclusion, l’estimation de la dépense énergétique n’est pas facile chez le chien. Si nous disposons d’un bon nombre d’informations, elles ne sont toutefois que parcellaires et difficilement généralisables. Sur un plan pratique, le suivi pondéral et la connaissance des consommations permettant de maintenir le poids constant sont les principales informations sur les besoins énergétiques d’un individu donné.
Les régulations physiologiques du poids corporel
Dans leur milieu d’origine, les canidés sauvages sont généralement actifs et même dans un environnement où la nourriture est abondante, il est extrêmement rare que les animaux adultes soient obèses. Les mécanismes biologiques régulateurs du poids corporel sont présents dans tout le règne animal et semblent agir de manière assez efficace contre la sous-alimentation.
Chez l’animal domestique, la pression environnementale rend plus utiles les mécanismes susceptibles de gérer la suralimentation. Les régulations hormonales de l’appétit, de la consommation alimentaire et de la dépense énergétiques sont de mieux en mieux connues, en particulier un certain nombre de facteurs comme la leptine, la ghréline ou l’adiponectine.
La leptine est une cytokine produite et sécrétée par les adipocytes. Elle agit comme signal modulateur de l’équilibre énergétique, à la fois au niveau central (sur l’hypothalamus) et périphérique (foie, pancréas…). Elle semble donc jouer un rôle clé dans la régulation de la consommation alimentaire. Lors de sa découverte, la leptine a été présentée comme une substance "miracle" pour le traitement de l’obésité puisque des injections de leptine chez des souris obèses ou saines ont provoqué des pertes significatives de poids corporel sans effet secondaire apparent. Néanmoins, il a été montré que chez l’homme ou le chien obèse (Ishioka et al., 2002; Gayet et al., 2003a; Jeusette et al., 2003, 2004b) il n’existait pas de déficit en leptine; au contraire, dans ces deux espèces, la leptine est produite de façon proportionnelle à la quantité d’adipocytes de sorte que les taux de leptine plasmatique sont plus élevés chez les individus obèses que chez les individus sains. La leptine augmente la dépense énergétique chez les individus sains mais chez les obèses, la situation est moins claire en raison d’un phénomène de résistance. D’autre part, il apparaît que l’insuline et de nombreux autres médiateurs jouent aussi un rôle dans la régulation de la leptine (Lonnqvist et al., 1999). Les études cliniques réalisées chez l’homme tendent à montrer que la concentration sanguine en leptine est dépendante de la sécrétion d’insuline, de la composition alimentaire et aussi de l’exercice (Koutsari et al., 2003). D’un point de vue pratique, vis-à-vis de l’obésité, le principal point à retenir est que la leptine diminue l’appétit. La leptinémie augmente d’ailleurs chez le chien en période de prise de poids (Gayet et al., 2003a, 2004b; Jeusette et al., 2004b).
La ghréline (GH-releasing hormone) a été identifiée par Kojima et al. (1999). Elle stimule la sécrétion de l’hormone de croissance (GH) et augmente l’ingestion alimentaire chez l’homme et les rongeurs. Chez les chiens obèses, nous avons constaté que la concentration plasmatique en ghréline est plus faible que chez des animaux sains (Jeusette et al., 2003, 2004b).
L’adiponectine est une cytokine sécrétée exclusivement par le tissu adipeux. Elle affecte l’homéostasie glucidique, la sensibilité à l’insuline et probablement l’homéostasie énergétique. Elle agirait en synergie avec la leptine (Yamauchi et al., 2001). Son expression est réduite chez les souris obèses et diabétiques (Hu et al., 1996). Elle est également diminuée de moitié chez les chiens obèses par rapport aux chiens sains (Gayet et al., 2004b).
Parmi les autres facteurs régulateurs, il faut encore citer le TNF-α (tumor necrosis factor). Cette cytokine identifiée à l’origine comme une molécule pro-inflammatoire participerait à l’anorexie et à la cachexie cancéreuse. Elle a été trouvée à des taux particulièrement élevés dans le tissu adipeux d’animaux et de patients obèses. L’expression et les concentrations de TNF-α sont positivement corrélées avec le degré d’obésité et la résistance à l’insuline (Hotamisligil et al., 1995) comme cela a été montré chez le chien (Gayet et al., 2004a).
Outre les mécanismes impliqués ci-dessus, l’activité des protéines découplantes (UnCoupling Protein ou UCP) mérite d’être soulignée. Ces protéines appartiennent à une famille de transporteurs présents au niveau de la membrane interne des mitochondries qui, en dissipant le gradient mitochondrial de protons, découplent la respiration de la synthèse d’ATP. L’activité de ces protéines varie dans le cadre de la thermorégulation et de la thermogenèse postprandiale. L’expression de l’UCP-1 est fortement réduite dans le tissu adipeux du chien obèse et insulino-résistant (Leray et al., 2003).
En conclusion, il apparaît que de nombreux facteurs impliqués dans le développement de l’obésité chez l’homme ou les rongeurs ont également été identifiés chez le chien, qu’il s’agisse de facteurs limitant l’appétit ou de facteurs augmentant les dépenses.
- La leptine est une protéine qui augmente la dépense énergétique chez les individus sains.
- La ghréline est une hormone orexigène principalement sécrétée par l’estomac et le duodénum.
- L’adiponectine agirait en synergie avec la leptine. Elle est sécrétée par le tissu adipeux.
La dynamique de la prise de poids
En dépit de ces mécanismes régulateurs, un bilan énergétique positif peut provoquer une prise de poids s’il est suffisamment important ou s’il persiste suffisamment longtemps. Une controverse existe quant à la durée du déséquilibre (apports énergétiques supérieurs aux dépenses). Chez l’homme, l’hypothèse retenue est que l’obésité s’installe lentement, suite à un déséquilibre prolongé (plusieurs années) mais de peu d’ampleur. Les cliniciens distinguent 3 phases:
- une phase statique de pré-obésité durant laquelle l’individu est soumis à un apport énergétique excédentaire mais durant laquelle le poids reste constant,
- une phase dynamique, au cours de laquelle l’individu prend du poids, principalement par augmentation de sa masse grasse mais également un peu de sa masse non grasse, ne serait ce que par une augmentation même faible du volume sanguin,
- une phase statique durant laquelle l’équilibre entre apports et dépenses est rétabli parce que la consommation alimentaire diminue. À ce stade, le poids est extrêmement élevé mais en regard, le métabolisme de base est relativement faible. C’est un nouvel état d’équilibre et l’obésité est généralement considérée comme "morbide" (WHO, 1997).
À partir d’un certain stade d’obésité, la consommation alimentaire peut diminuer sans que le chien maigrisse car le métabolisme de base est relativement faible. (© Faculté de Médecine Vétérinaire de Liège).
Ces données sont presque directement transposables au chien de compagnie à condition de réaliser quelques ajustements. En ce qui concerne la durée du déséquilibre énergétique, il faut adapter les données à la durée de vie du chien et retenir ce que nous voyons en pratique. L’excès pondéral peut survenir très rapidement, en quelques semaines ou quelques mois. Une prise rapide de poids peut survenir dans les semaines qui suivent la stérilisation chez les chiennes. L’alimentation ad libitum durant la croissance peut induire un surpoids très important chez des chiens âgés de 8 mois.
La phase de pré-obésité n’a pas été décrite chez le chien. Les phases dynamique et statique l’ont en revanche bien été (Figure 4). La phase dynamique peut être linéaire ou constituée de paliers. Lors de la phase statique, le poids est stabilisé; l’appétit peut être normal ou diminué. Ceci explique que l’on puisse fréquemment voir en clinique des chiens obèses "qui ne mangent pas grand-chose". Il est cependant évident que l’apport énergétique a été supérieur aux besoins à un moment donné de leur vie - parfois plusieurs années auparavant. Cependant, une fois ces animaux "stabilisés", leurs besoins énergétiques sont faibles, et ce d’autant plus qu’à ce stade, l’activité physique est souvent très limitée.
Qualité des apports alimentaires
Les diverses études menées chez l’homme et les animaux de laboratoire démontrent que les facteurs alimentaires, particulièrement l’apport énergétique et le taux de matières grasses sont étroitement corrélés avec l’excès pondéral.
Figure 4. Évolution pondérale de 3 chiens de race beagle soumis à un régime riche en matières grasses.
Apports énergétiques et macro-nutriments
Chez le chien, le calcul des apports énergétiques d’un aliment est basé sur sa composition chimique. Les lipides sont les nutriments les plus énergétiques. La surconsommation d’aliments gras est donc un facteur essentiel dans la genèse de l’obésité. Or, l’addition de matières grasses est un moyen utilisé pour augmenter l’appétence et même la concentration énergétique des aliments.
En terme d’énergie métabolisable, les apports en protéines et en glucides sont équivalents. Cependant, lorsque l’on calcule les apports en énergie nette, la valorisation énergétique des protéines est plus faible (Tableau 7) (Rubner, 1902). C’est une des raisons, outre l’effet spécifique de certains acides aminés (lysine, phénylalanine, leucine), pour lesquelles les protéines ont aussi un effet plus rassasiant que les glucides. Les chiens étant des carnivores, ceci peut expliquer, au moins partiellement, la résistance à l’obésité des canidés sauvages.
Les glucides digestibles apportent sensiblement tous la même quantité d’énergie mais ils induisent cependant des effets métaboliques différents, sur la sécrétion d’insuline notamment. Ce point est développé plus loin.
D’un point de vue théorique, il pourrait être admis que l’adaptation mathématique des apports énergétiques aux dépenses suffit à prévenir l’obésité canine. Mais ce serait ignorer que dans certains cas, parce qu’on raisonne en "énergie métabolisable", la simple modification de la composition chimique de l’aliment - sans modifier les apports énergétiques totaux - peut entraîner des modifications de la composition corporelle et modifier le métabolisme de base. Ce dernier point a été mis en évidence chez le chien et est bien établi en alimentation humaine (Bouché et al., 2002).
Diagnostic et évaluation de l’obésité
Une des questions majeures qui se pose au clinicien est l’évaluation du degré d’obésité de l’animal dans les nombreux cas où le poids optimal est inconnu. En médecine humaine, il est aisé de calculer un intervalle de poids optimal en fonction de la taille grâce à l’IMC (Indice de Masse Corporelle) qui est le rapport poids/hauteur2. Les médecins disposent donc d’IMC de références. De tels indices ne sont pas disponibles chez les carnivores domestiques et les divers essais de mesures morphométriques se sont révélés peu concluants étant donné la grande diversité des races canines. D’autres outils moins standardisés sont donc proposés en médecine vétérinaire.
Le poids corporel
La méthode la plus simple est la référence au poids corporel. S’il est aisé de peser un chien, la seule mesure de son poids n’est pas suffisante pour apprécier son état d’embonpoint. Sans référence à son poids idéal, cette mesure est de peu d’intérêt. Même s’il est facile de la comparer aux standards de la race pour les chiens de race pure, cette dernière donnée n’est pas totalement satisfaisante: en effet, la stature de l’animal peut faire varier largement le poids corporel (Tableau 8).
Lors de chaque visite chez le vétérinaire, il faut peser les chiens et conserver les données dans le dossier médical. Il est en effet nécessaire pour le rationnement de l’animal obèse de connaître ou d’estimer le poids idéal. Ce point est déterminant pour conseiller un rationnement permettant un amaigrissement.
Mesures morphométriques
La combinaison de données staturales et du poids corporel introduit la notion des techniques morphométriques pour évaluer la composition corporelle. La morphométrie, mesure de la forme externe, évalue certaines régions du corps et leurs changements de dimensions, en les mettant en rapport avec des modifications de la composition corporelle. Les techniques morphométriques utilisées chez le chien sont la notation de l’état corporel (BCS, Body Condition Scoring des Anglo-Saxons), et les techniques combinant les mesures de divers paramètres corporels: longueurs et circonférences diverses.
Un dépôt massif de tissu adipeux sur la colonne vertébrale et à la base de la queue fait partie des critères d’appréciation de l’obésité.
Tableau 8a - Variation du poids de référence selon le sexe dans plusieurs petites races | ||
Petites races | Poids moyen chez le mâle (kg) | Poids moyen chez la femelle (kg) |
Chihuahua | 2.0 ± 0.6 | 1.5 ± 0.4 |
Yorkshire | 2.6 ± 0.5 | 2.3 ± 0.5 |
Spitz nain | 3.6 ± 0.8 | 2.5 ± 0.6 |
Lévrier italien | 4.1 ± 0.5 | 4.6 ± 0.1 |
Shi Tzu | 5.8 ± 1.3 | 5.0 ± 0.8 |
Caniche nain | 5.8 ± 1.4 | 5.0 ± 0.8 |
West Highland White Terrier | 7.5 ± 1.2 | 6.9 ± 0.6 |
Cairn Terrier | 8.1 ± 0.2 | 7.4 ± 1.2 |
Cavalier King Charles | 8.7 ± 1.5 | 7.0 ± 1.1 |
Teckel standard | 9.2 ± 1.2 | 7.5 ± 1.8 |
Mesures réalisées sur 184 mâles et 221 femelles de petites races. |
Chiots Cavalier King Charles (© Renner).
Tableau 8b - Variation du poids de référence selon le sexe dans plusieurs races moyennes | ||
Races moyennes | Poids moyen chez le mâle (kg) | Poids moyen chez la femelle (kg) |
Berger des Pyrénées | 12.8 ± 2.8 | 13.4 ± 3.8 |
Bouledogue français | 13.0 ± 1.6 | 11.3 ± 1.9 |
Cocker anglais | 13.0 ± 2.3 | 11.8 ± 1.0 |
Whippet | 13.9 ± 1.1 | 11.7 ± 0.7 |
Épagneul Breton | 17.9 ± 2.2 | 15.5 ± 1.5 |
Staffordshire Bull Terrier | 24.0 ± 1.1 | 21.0 ± 1.4 |
Bulldog anglais | 26.0 ± 4.3 | 22.4 ± 3.6 |
Colley | 23.9 ± 0.5 | 19.8 ± 2.0 |
Sibérian Husky | 24.0 ± 0.9 | 18.5 ± 1.0 |
Shar Pei | 24.9 ± 1.7 | 18.4 ± 0.6 |
Mesures réalisées sur 98 mâles et 99 femelles de races moyennes. |
Chiots Bulldog anglais (© Lanceau).
Tableau 8c - Variation du poids de référence selon le sexe dans plusieurs grandes races | ||
Grandes races | Poids moyen chez le mâle (kg) | Poids moyen chez la femelle (kg) |
Setter irlandais | 26.1 ± 1.9 | 25.5 ± 4.5 |
Berger belge malinois | 27.1 ± 4.5 | 23.2 ± 2.0 |
Braque allemand | 28.5 ± 0.9 | 24.6 ± 2.3 |
Épagneul français | 29.4 ± 2.1 | 26.3 ± 3.6 |
Braque de Weimar | 33.6 ± 3.7 | 30.5 ± 4.3 |
Golden Retriever | 33.7 ± 3.4 | 30.4 ± 3.6 |
Boxer | 33.9 ± 3.5 | 28.8 ± 2.4 |
Labrador | 35.5 ± 4.5 | 30.7 ± 3.4 |
Berger allemand | 35.9 ± 3.6 | 28.4 ± 2.7 |
Dobermann | 39.0 ± 5.5 | 28.50 ± 5.0 |
Mesures réalisées sur 530 mâles et 488 femelles de grandes races. |
Chiots Labrador (© Hermeline/Doxicat).
Tableau 8d - Variation du poids de référence selon le sexe dans plusieurs races géantes | ||
Races géantes | Poids moyen chez le mâle (kg) | Poids moyen chez la femelle (kg) |
Rottweiler | 46.8 ± 4.8 | 39.7 ± 4.9 |
Bouvier bernois | 59.9 ± 6.9 | 43.3 ± 6.5 |
Léonberger | 57.0 ± 6.4 | 49.9 ± 6.8 |
Dogue de Bordeaux | 58.6 ± 7.3 | 46.8 ± 7.5 |
Bull Mastiff | 58.8 ± 7.5 | 47.7 ± 6.4 |
Irish Wolfhound | 63.1 ± 1.4 | 54.3 ± 4.9 |
Terre-Neuve | 63.5 ± 6.2 | 51.1 ± 8.6 |
Dogue allemand | 70.5 ± 8.2 | 56.6 ± 7.1 |
St Bernard | 81.5 ± 7.2 | 61.0 ± 8.9 |
Mastiff | 87.0 ± 10.5 | 71.6 ± 9.2 |
Mesures réalisées sur 580 mâles et 628 femelles de races géantes. |
Chiots Bouvier Bernois (© Renner King).
L’indice corporel est une méthode d’évaluation semi-quantitative et subjective associant l’évaluation des caractéristiques visibles et une palpation de certaines régions corporelles. L’évaluation est réalisée selon des critères simples: importance et localisation des dépôts adipeux, structure squelettique visible ou non, et aspect de la silhouette de l’animal.
Plusieurs types d’indices corporels ont ainsi été proposés:
- en 3 points: 1 = mince, 2 = optimal, 3 = excédentaire,
- en 5 points: 1 = maigre, 2 = mince, 3 = optimal, 4 = gros, 5 = obèse (Edney & Smith, 1986) (Tableau 9)
- et même en 9 points: 1 à 4 = émacié à mince; 5 = optimal; 6 à 9 = en excès pondéral croissant (Laflamme, 1993; Laflamme et al., 1994a).
Les animaux présentant un indice moyen correspondant à un poids optimal ont une masse lipidique d’environ 13 %. Lors de l’utilisation d’un indice corporel en 9 points, la masse lipidique augmente de 9 % pour chaque point d’augmentation de l’indice corporel (Mawby et al., 2000). Par conséquent, un animal présentant un indice corporel de 9, correspondant à ce que l’on peut qualifier d’obésité morbide, a une masse graisseuse de plus de 40 %. Ces systèmes d’indice présentent l’avantage d’être facilement utilisables par le clinicien et ils ne s’appliquent évidemment pas qu’au diagnostic de l’obésité mais aussi à sa prévention active. Lors d’une consultation de routine, il est aisé de peser l’animal et de fixer un indice.
Le passage d’une échelle de 5 à 9 points s’effectue aisément en utilisant des graduations intermédiaires dans l’échelle de 5 points. Ici, l’indice corporel de cette chienne Beagle peut être noté 4,5/5 ou 8/9. (© I. Jeusette).
Tableau 9 - Indices corporels en 5 points | ||
Notation | Chien | |
1. Cachexie plus de 20 % en dessous du poids optimal. | - Côtes, colonne vertébrale, os du bassin facilement visibles (poils courts) - Perte évidente de masse musculaire - Pas de graisse palpable sur la cage thoracique | |
2. Maigreur 10 à 20 % en dessous du poids optimal. | - Côtes, sommets des vertèbres, os du bassin visibles - Ceinture abdominale (taille) évidente - Pas de graisse palpable sur la cage thoracique. | |
3. Poids idéal | - Côtes, colonne vertébrale non visibles, mais facilement palpables - Ceinture abdominale (taille) évidente - Mince couche de tissu adipeux palpable sur la cage thoracique | |
4. Excès de poids 10 à 20 % au-dessus du poids optimal. | - Côtes et colonne vertébrale palpables avec difficulté - Ceinture abdominale (taille) absente - Dépôt adipeux évident sur la colonne vertébrale et la base de la queue | |
5. Obésité morbide à partir de 40 % au-dessus du poids optimal. | - Dépôt adipeux massif sur le thorax, la colonne vertébrale et la base de la queue - Distension abdominale évidente | |
La surcharge pondérale augmente de 10 % pour chaque demi-point au-dessus de la note 3. Un chien noté 4,5 présente par exemple un excès de poids de 30 %. |
Les mesures de diverses circonférences: périmètres thoraciques et pelviens par exemple, combinés à leur exploitation dans des systèmes d’équations ne permettent pas une appréciation fine de la masse lipidique en raison des différences morphologiques d’un animal à l’autre. Ils constituent cependant un bon moyen de suivre l’effet de l’amaigrissement chez un chien donné. Les différentes mesures corporelles requièrent toutefois une certaine expérience du praticien ainsi que la coopération de l’animal (Burkholder, 2000).
Mesures par ultrasons
Les ultrasons ont été utilisés pour mesurer l’épaisseur de la couche de graisse sous-cutanée chez le chien (Anderson & Corbin, 1982; Morooka et al., 2001). La combinaison de cette technique à d’autres peut se révéler intéressante pour localiser les principaux dépôts lipidiques et comprendre les mécanismes du développement de l’obésité (Morooka et al., 2001). De plus, cette technique est relativement simple et non invasive; elle est intéressante en clinique à condition de disposer du matériel adéquat. Son champ d’application est cependant étroit: elle ne permet d’évaluer que la graisse sous-cutanée. Plusieurs endroits de mesure ont été testés, dont le milieu de la région lombaire ou les apophyses lombaires L6 et L7 ou sacrées (S1). La difficulté est la reproductibilité : il faut raser la peau, standardiser la position de l’animal, la pression de la sonde et utiliser des points de repère objectifs. L’utilisation des ultrasons dans 2 dimensions permet d’améliorer la technique et d’obtenir des chiffres plus précis (Morooka et al., 2001).
La DEXA
L’utilisation de la DEXA (Dual Energy X-ray Absorptiometry ou absorptiométrie biphotonique aux rayons X à double énergie) (Munday et al., 1994) permet de différencier la nature et la quantité de chaque tissu présent dans les parties de l’organisme soumis à l’examen et par exemple, de suivre l’évolution de la composition corporelle du chien au cours de la période d’amaigrissement en conditions expérimentales. Cet examen exige la tranquillisation de l’animal. Les résultats concernent la masse minérale osseuse, le tissu adipeux et la masse maigre de l’organisme (Figure 5). La masse grasse ne devrait pas dépasser 30 % (idéalement: 20 à 25 %).
Figure 5. Images (obtenues par la technique de dexa) d’un labrador male stérilisé de 4,5 ans, avant (t0) et 5 mois (t+5) après la mise en place d’un régime hypoénergétique. (© Alex German).
Les isotopes lourds
L’eau corporelle est prédominante dans les tissus maigres; dès lors sa mesure est une mesure indirecte de la masse maigre. La quantité d’eau corporelle totale peut être estimée par la détermination de la dilution de l’oxyde de deutérium (D2O) ou de l’eau enrichie en O18. La masse grasse et son pourcentage peuvent être calculés par différence. Le deutérium et l’O18 sont deux excellents traceurs non radioactifs et non toxiques à doses faibles. Cette méthode requiert une prise de sang avant l’injection sous-cutanée du traceur et une seconde prise de sang 4 à 5 heures plus tard. Elle pourrait être utilisée en pratique pour estimer le pourcentage de tissu gras des chiens obèses, à condition d’avoir accès à la technique de mesure (spectrométrie de masse). Cette méthode très peu invasive a été validée chez le chien (Pouteau et al., 1998; Son et al., 1998).
T0 | T+5 | |
Poids (kg) | 45.90 kg | 37.10 kg |
Masse grasse totale | 20.45 (45.4%) | 12.72 (35.1%) |
Masse maigre totale | 23.14 (54.6%) | 22.18 (64.9%) |
Perte de poids totale = 8,8 kg (19,2 % du poids initial) | ||
La perte de poids se répartit entre 87 % de masse grasse (7,7 kg en tout) et 13 % de masse maigre (1,12 kg en tout). La masse grasse finale est encore élevée (35 %), mais compatible avec la race du chien. |
Impédance bio-électrique
Chez l’homme, la mesure de l’impédance bio-électrique est une méthode simple, non invasive, rapide, portable et reproductible pour étudier la composition corporelle. Actuellement, cette méthode a été testée chez le chat et chez le chien (Elliott et al., 2002a, 2002b).
Ces 3 dernières méthodes, d’utilisation récente chez les carnivores, donnent des résultats bien corrélés (Son et al., 1998). Elles sont certainement plus applicables à des protocoles de recherche qu’à des situations cliniques. Elles ont néanmoins ouvert des perspectives intéressantes pour comparer l’efficacité des différents aliments hypoénergétiques présents sur le marché (Diez et al., 2002).
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Affiliation of the authors at the time of publication
1Department of Animal Productions, Faculty of Veterinary Medicine, University of Liège, Liège, Belgium.
2ENVN Atlanpôle, La Chantrerie, Nantes, France.
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